Schizophrénie : « Quand on m’a diagnostiqué, je me suis dit, ce n’est pas moi, je ne suis pas violent »

Schizophrénie : « Quand on m’a diagnostiqué, je me suis dit, ce n’est pas moi, je ne suis pas violent »



Schizophrénie : « Quand on m’a diagnostiqué, je me suis dit, ce n’est pas moi, je ne suis pas violent »

TEMOIGNAGESÀ l’occasion des SchizAwards cette semaine, des personnes atteintes de schizophrénie racontent comment le cinéma a contribué à les stigmatiser
Joaquin Phoenix dans le rôle du Joker.
Joaquin Phoenix dans le rôle du Joker. - LILO/SIPA / SIPA
Laure Beaudonnet

Laure Beaudonnet

L'essentiel

  • L’association PositiveMinders lance ce jeudi la campagne décalée des SchizAwards qui, sous la forme d’une cérémonie, décrypte les représentations erronées véhiculées par le cinéma.
  • A cette occasion, des personnes atteintes de schizophrénie racontent comment les films comme Fight Club ont rendu terrible l’annonce du diagnostic.
  • Pourtant, une fois l’état stabilisé, la plupart des symptômes disparaissent. Une forme de « normalité » peut être trouvée.

«Un tiers des personnages de fiction diagnostiqués schizophrènes sont dépeints comme des meurtriers », rappellent les SchizAwards, la première cérémonie qui vise à faire changer de regard sur ce trouble psychiatrique, en référence à une étude de l’université St Mary’s à Londres publiée en 2012 sur plus de 40 films sortis entre 1990 et 2010.

L’association PositiveMinders lance ce jeudi une campagne décalée qui, sous la forme d’une cérémonie, décrypte les représentations erronées véhiculées par le cinéma. A cette occasion, des personnes atteintes de schizophrénie racontent à 20 Minutes comment ils ont vécu l’annonce du diagnostic.

« Avant d’être diagnostiqué schizophrène, j’avais l’image d’un potentiel criminel, du malade très violent, comme dans Fight Club, déplore Jean-Baptiste, 26 ans, qui a décompensé sa pathologie pendant sa Licence d’Histoire à Angers.

« Le mot "schizophrénie" fait peur »

« Le mot "schizophrénie" fait peur, il est difficile à prononcer. "Malade mental" renvoie à psychopathe, tueur en série… », poursuit Jean-Baptiste. Et Hollywood est en partie responsable de cette terrible image des personnes atteintes de schizophrénie. La preuve : les héros de Black Swan, de Darren Aronofsky, de Fight Club, de David Fincher, ou le Joker de Todd Phillips, incarnent des figures horrifiques du septième art. Et, ils ne sont pas sans conséquences pour les malades qui sont stigmatisés et mis à l’écart de la société.

« Quand on m’a posé le diagnostic, je me suis dit, ce n’est pas moi, j’ai toujours été quelqu’un d’amical, je ne suis pas violent, confie Jean-Baptiste. Je suis entré dans une période de déni de la maladie pendant plusieurs années. Je ne voulais pas voir la réalité en face ». De même, Laurent, qui a fait sa première crise à 23 ans pendant son service militaire, a mis du temps à accepter son traitement. Le diagnostic a été posé dix ans après sa première crise. « A l’époque et encore aujourd’hui, le personnel médical a du mal à donner le diagnostic parce qu’il a peur que les personnes s’autostigmatisent et en arrivent à mettre fin à leurs jours », poursuit-il.

Aujourd’hui, Laurent a 58 ans et il travaille comme Médiateur de Santé-Pair (MSP), dans l’accompagnement, le soutien et l’orientation des personnes en s’appuyant sur son propre parcours de rétablissement. « La schizophrénie est une maladie qui fait peur. Quand vous en parlez à quelqu’un que vous ne connaissez pas, il a tendance à avoir une représentation erronée de la pathologie », note-t-il. Il se souvient de la première fois où il en a parlé à sa professeure d’Arts plastiques avec qui il prenait des cours du soir à Colmar. « Son visage a changé d’apparence. Elle me l’a avoué après, elle s’est dit : il peut sortir un couteau à tout moment. C’est le mythe de Dr Jekyll et Mr Hyde. Les gens pensent qu’on a plusieurs personnalités ». Ce qui est faux.

La double personnalité n’existe pas

« La double personnalité n’a rien à voir avec la schizophrénie, insiste Christophe Debien, psychiatre hospitalier et auteur de Nos héros sont malades (Humensciences, 2020). Pour lui, Psychose d’Alfred Hitchcock donne une première explication à la perception de cette maladie. « Aux Etats-Unis, le film s’appelle Psycho qui veut dire psychopathe et non psychose [psychosis, en anglais]. Il y a un défaut de traduction quand on passe l’Atlantique, analyse le psychiatre. La double personnalité est un ressort scénaristique génial, le spectateur se laisse entraîner et découvre que les deux personnages ne font qu’un dans un twist génial à la fin ». Mais ce symptôme ne fait pas partie du spectre de la schizophrénie qui se caractérise plutôt par des hallucinations, des délires et de la dissociation, c’est-à-dire une certaine incohérence entre les émotions et les actions.

« Quand j’ai fait ma première crise, j’étais musicien à l’armée, c’était une décompensation mystique, confie Laurent. Vous vous prenez pour un prophète, vous accédez à une ouverture spatiotemporelle de compréhension et vous pensez que vous allez sauver le monde. Vous êtes dans un bien-être euphorisant sauf que vous n’arrivez plus à gérer ». De son côté, Jean-Baptiste, qui a fait plusieurs rechutes, décrit des hallucinations visuelles.

« Je voyais des personnes avec une aura, comme des anges, qui disparaissaient. On finit par douter de la réalité, on se demande si notre interlocuteur est réel, c’est très angoissant », confie le jeune adulte qui a réussi à reprendre le pouvoir sur ses symptômes. Il ne voit plus la schizophrénie comme une fatalité, notamment grâce aux pairs aidants, comme Laurent, qui lui ont redonné espoir. Mais il regrette de ne pas avoir été informé des effets secondaires des médicaments qui lui ont fait prendre 40 kg.

Jusqu’à dix ans de retard de diagnostic

La stigmatisation des maladies mentales touche aussi les soignants, perçus comme violents. Le malade craint d’aller se soigner de peur d’être attaché, enfermé, piqué ou lobotomisé comme dans Vol au-dessus d’un nid de coucou, de Milos Forman. « La conséquence majeure de ces représentations, c’est la honte et le repli sur soi », dénonce Christophe Debien. « Ils se disent : "je ne vais pas sortir puisque tout le monde a peur de moi". Voire, "je ne vais pas dehors parce que j’ai peur de devenir violent". La peur infuse chez les patients qui craignent leurs propres réactions », poursuit le psychiatre.

Résultat : certains malades se retrouvent sans traitement pendant une décennie. « C’est une catastrophe pour une maladie chronique d’avoir dix ans de retard de diagnostic, poursuit le médecin. Imaginez dix ans avec un diabète non traité ou un cancer non traité. Il est beaucoup plus difficile de revenir à un fonctionnement satisfaisant et de rattraper les conséquences sociales ».

Heureusement, les personnes qui souffrent de schizophrénie ne finissent pas comme le Joker. Bien accompagnées et stabilisées, elles peuvent retrouver une forme de normalité. « On rêve juste d’avoir une vie classique : un travail, une vie sociale… On veut vivre normalement », espère Jean-Baptiste. Encore faut-il que le monde du travail appréhende mieux cette pathologie et ses conséquences sur quotidien du malade.

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